dimanche 14 novembre 2010

Cintrage du chevalet

Le cintrage du chevalet est une opération délicate, car il faut mettre en forme un morceau de hêtre, sans le casser....

Trempage.

Pour cela, je laisse le chevalet tremper 24 heures dans l'eau, pour l'assouplir un peu (sur un mètre, côté des aigus, là où la courbe est la plus forte), dans un tuyau de PVC fermé à une extrémité.


Trempage du chevalet

C'est quelque chose que j'ai déjà fait sur "A tempo giusto".

Cintrage du chevalet sur "A tempo giusto"

Pour le tenir en place, j'ai préparé une bonne douzaine de clous, "paddés" avec du carton, que j'enfoncerai à travers le chevalet, après avoir percé un trou, pour le clouer sur le fond, pour qu'il reste en place.


Clous "paddés"

Pour bien le cintrer, il faut aussi le chauffer. J'utilise alors mon fer à vapeur.

Début du cintrage

Et tout doucement, je pousse le chevalet vers l'arrière. Dès qu'il commence à rentrer dans le gabarit : je perce, et je cloue.

En moins d'une heure, le chevalet est en place, dans le gabarit, solidement fixé au fond. Il ne reste plus qu'à bien le laisser sécher !


Cintrage terminé

Tant que j'y suis, je découpe le fond à la scie sauteuse (pour le mettre à la dimension), à environ 11 cm du chevalet (comme sur le plan du Grimaldi).

Découpe du fond à la scie sauteuse.

Il va falloir ensuite rectifier la courbe, pour avoir une courbure homogène, et rendre le bord strictement vertical. Ceci se fait à la wastringue (rabot à deux poignées).


Rectification à la wastringue.
C'est tout pour aujourd'hui !

A suivre ....

jeudi 11 novembre 2010

Gabarit de cintrage du chevalet

Le chevalet.

Grâce à un ami, facteur réputé (Merci Alain), j'ai obtenu deux chevalets italiens, en hêtre, qui attendaient sagement au fond de son atelier une destinée musicale.
Le profil est tout à fait idoine.

Profil en coupe du chevalet

Comme il est d'usage sur les italiens, je termine l'extrémité par une petite volute, à ma façon.



Volute d'extrémité du chevalet

Préparation du gabarit de cintrage.

Maintenant, il faut préparer un gabarit pour cintrer le chevalet et lui donner la forme déterminée.
Pour cela, je transfère d'abord sur le fond la courbe dessinée sur le papier par l'intermédiaire de petits trous effectués point par point avec un clou et un marteau.


Transfert de la courbe du chevalet, sur le fond.

On remarque les petits trous sur le fond.

Avec des restes de sautereaux (en poirier), à une distance de 5 mm correspondant à l'écart entre l'endroit où seront les pointes sur le chevalet, et la face interne, je cloue sur le fond des petits bouts de bois en les laissant toutefois mobiles autour de la pointe. (Clous de 1mm et trous de 1,2 mm). Et j'en mets autant que de besoin, surtout au départ de la courbe. Ces petits bouts de bois vont servir en quelque sorte de tangente articulée le long du chevalet.

Début du gabarit de cintrage

Pour éviter que le chevalet, une fois positionné, ne ripe sur les petits morceaux de bois, je complète avec d'autres, à cheval. Ceci me donne une hauteur de 6 mm qui devrait être suffisante pour bien tangenter le chevalet.

Gabarit de cintrage terminé

Maintenant, il reste à préparer le chevalet à l'opération de cintrage .....

A suivre ...

samedi 23 octobre 2010

Sommier en noyer


Voila quelques mois que la construction d'Opus-5 est quelque peu stoppée; les vacances et les voyages m'ont détourné quelque peu de l'objectif ... Mais maintenant, les frimas arrivent et il est temps de reprendre le chemin de l'établi.

J'avais lancé des pistes pour trouver du noyer, puisque le Grimaldi 1697 est indiqué comme avoir un sommier en noyer. Pas facile à trouver, surtout dans une bonne épaisseur.
En désespoir de cause, j'ai fini par me décider pour du noyer américain et j'ai acheté, cher (3 fois plus que le cèdre au m3 ...); un plot en 35 mm d'épaisseur.

Bois de noyer américain

Et de plus, au coeur de l'arbre !

En dégauchissant une face, j'ai préparé une ébauche de sommier et avec des supports provisoires je regarde attentivement comment tout cela se place.


Ebauche de sommier en position

Des traits sont tracés pour respecter dimensions et angles. Il restera à découper sans erreur.


Tracés de coupe
Pour ce qui est des montants pour soutenir le sommier, j'ai fait des essais avec du chêne, mais je trouve ce bois trop lourd. Je vais alléger en prenant du cèdre, mais je dois trouver un menuisier pour me le "déligner", et me faire des planches de 25 mm à la bonne cote (la petite scie à ruban que j'ai achetée ne me le permet pas).

Le tracé du chevalet est fait, sur le fond. J'ai une piste avec un facteur pour trouver un chevalet mais pas encore de résultat.

A suivre ...

vendredi 2 juillet 2010

Géométrie, quand tu nous tiens !

J'ai découpé, dans le plan du Grimaldi, la partie interne, c'est à dire sans les éclisses, et en coupant au niveau de l'avant du sommier. Je le positionne sur le fond, en prenant comme repère la fosse que j'ai dessinée à partir de la position du clavier.


Positionnement du plan sur le fond.

Mais, ô stupeur, en alignant bien le plan sur les lignes de la fosse, le plan s'en va tout de travers !



Que se passe-t-il ?
L'erreur est vite trouvée, l'angle de la fosse du Grimaldi par rapport à l'échine (côté gauche) est plus faible d'un degré (3° env.) que l'angle du clavier que j'ai récupéré (4° env.). Dans ces conditions, le plan part vers la droite !

En fait, j'ai trois problèmes à résoudre :
- l'angle de la fosse,
- le module du clavier,
- la profondeur du clavier (qui est plus long que celui du plan de 23 mm à gauche et 10 mm à droite, d'où l'angle différent).

Chacun de ces trois éléments modifie le plan de l'instrument, et je ne peux donc pas me servir directement du plan du Grimaldi.

Je commence donc par positionner le plan strictement sur le bord gauche du fond, et longitudinalement, je m'arrange pour que les droites qui délimitent la fosse sur le plan et sur le fond, se coupent à peu près au milieu.

Le plan aligné à gauche.
C'est quand même plus propre.

Maintenant, il s'agit de dessiner les cordes, parallèlement au côté gauche, et selon le module du clavier et des registres.

Sur le plan du Grimaldi, la distance de 3 octaves est de 505 mm, soit 14,03 mm d'espacement des cordes.

Sur le clavier, et a fortiori sur les registres, la distance de trois octaves est de 491 mm, soit 13,64 mm d'espacement entre les cordes.

Je ne peux donc pas me servir du plan pour déterminer le chevalet, les pointes du chevalet et du sillet. Il faut que je redessine au moins certaines cordes.


Positionnement du clavier et d'un registre sur le plan.

Je commence donc par positionner le clavier et un registre sur le plan, pour vérifier que les cordes dessinées vont passer au bon endroit par rapport au clavier, et donc aux registres.

Puis je commence par dessiner la corde du ré aigu (d'''), en vérifiant que le sautereau se positionne bien en retrait de la ligne tracée pour permettre 3mm de bec. J'utilise une règle qui passe en dessous du registre légèrement surélevé de chaque côté.


Alors je dessine l'ut aigu (c'''), puis les autres ut (j'ai pas dit zut !), en descendant, et en vérifiant bien l'espacement de 163,7 mm qui est le module de l'octave du clavier.


Dessin des premières cordes.
En mettant quelques sautereaux dans le registre, je vérifie que les lignes des cordes sont bien tracées. Evidemment, les lignes tracées diffèrent quelque peu de celles du plan.

Il va falloir maintenant positionner chevalet et sillet en essayant de respecter la courbe pythagoricienne, qui veut que chaque fois qu'on descend d'une octave, on multiplie la longueur par deux !

Remarque : c'est très pratique de travailler sur un plan à même le fond. Le moment venu, avec une pointe, on pourra reporter directement le plan sur le fond pour "former" le chevalet .....

A suivre !...

lundi 28 juin 2010

Rectification du clavier.

La géométrie de l'instrument va dépendre du positionnement du clavier. Mais, une fois ce dernier posé sur le fond, je m'aperçois de divers problèmes.

Premièrement, les ergots de bout de touche dépassent du peigne à l'arrière. Cela peut être facheux dans la mesure où le peigne vient très près de la "lower belly-rail"; le jeu entre le peigne et cette planche est de 2 mm, car il doit permettre la transposition vers le haut, soit au moins 1,2 mm, puisque le châssis du clavier est trapézoïdal. Je décide donc de rectifier ces ergots à la ponceuse.



Opération de rectification.


Ergot rectifié.

Et pour diminuer les bruits de frottement, je "graphite" les deux faces des ergots pour qu'ils coulissent au mieux, et sans bruit, dans les fentes du peigne. Ca n'a l'air de rien mais dans le silence de l'atelier, cela s'entend !


Graphitage des ergots de bouts de touches.

Ensuite, je m'aperçois que le châssis du clavier est voilé; il ne repose pas bien à gauche sur le fond. Je fabrique donc une fine cale (2mm) en biseau, que je colle, pour ajuster le coin gauche du clavier avec le fond, pour éviter qu'il ne bouge et qu'il reste bien dans son plan.

Collage de la cale.

Puis je vérifie la planéité du tout, sur le fond.

Le plan des bouts de touches.

Le plan du bout des touches est à 43mm du fond (à gauche comme à droite), soit 1 mm au-dessus du Grimaldi 1697, car la barre de balancement fait un mm de plus. Cela donne une première cote pour l'élévation et les calculs ultérieurs.

Au passage, j'en profite pour régler la hauteur de certaines touches (trop hautes ou trop basses) du clavier, en jouant sur l'épaisseur et le nombre des "mouches" au niveau des points de balancement.



Vue sur les "mouches".

J'en profite aussi pour le cirer. Apparemment, le vernis qui a été passé sur les touches est très léger, car l'encaustique à la cire d'abeille est absorbé très vite. Il faudra que j'en passe plusieurs fois. J'aime bien les claviers doux sous les doigts et bien cirés; c'est le premier contact avec l'instrument !

Je rectifie aussi le fait que certaines feintes noires laissent voir la touche sur laquelle elle sont collées, ainsi que deux ou trois qui entrainent une marche par frottement, dans leur mouvement.

Dès que j'aurai approvisionné du drap, j'en rajouterai une couche sous les touches, à l'avant, car la couche de drap existant est trop fine, et le "dip" (profondeur d'enfoncement) me semble trop important. Mais ce sont des réglages à faire à la fin, les sautereaux et le chapiteau étant en place. Normalement, sur les clavecins italiens, c'est la planche avant du châssis du clavier, muni de drap, qui arrête la course des touches.

Le clavier ainsi rectifié est posé sur le fond, et les opérations de traçage vont pouvoir commencer, en fonction du clavier et du plan du Grimaldi 1697.


Début du traçage.

A suivre !...

lundi 21 juin 2010

Opus-5 : c'est parti !

Le projet Opus-5 est démarré.

J'ai rencontré Ricardo, un ancien ouvrier d'un facteur parisien, qui connait bien le métier et qui possède l'outillage pour faire un fond. Je lui ai donné du bois de Cèdre que j'avais approvisionné en avril, et aujourd'hui, fête de la Musique, il m'a livré un fond qui fait exactement la dimension du clavecin précédent (on avait fait un patron avec du carton), mais qui nécessitera bien sûr d'être retaillé.



Le bois est joli, sans noeud, doux au toucher et avec une odeur typique de résineux quand on le frotte. Après l'usinage, le fond laisse dans l'atelier une odeur qui devient vite entêtante; la bonne odeur du Cèdre. L'épaisseur est de 18 mm, comme sur le plan du Grimaldi (pas raison de faire moins).

Je vais réutiliser a priori le clavier de l'ancien instrument qui va de GG à e''' en chromatique. Mais le clavier du Grimaldi 1697 va de AA à c''', sans GG#. De plus, il n'a pas exactement le même module (intervalle entre deux paires de cordes ou deux sautereaux). De ce fait, je suis obligé de redessiner un plan pour l'instrument, d'autant que je ne compte pas faire une double transposition : cela va éviter deux cordes dans les graves et diminuer un peu la tension. Il n'y aura donc qu'une transposition 415-440Hz.
L'instrument sera donc un peu moins large que le précédent d'environ 13,7 mm, le module du clavier, ou alors j'augmenterai un peu les blocs de bout de clavier pour ajuster la largeur.

Clavier actuel posé sur la planche du fond.

Pour dessiner l'instrument, je vais utiliser la méthode "inside-out" décrite par Denzil Wraight, Stephen Birckett et William Jurgenson dans la littérature. C'est à dire que l'on commence par dessiner, sur le fond, tous les éléments géométriques, et notamment le chevalet; les murs viendront après, en finition, une fois tous les autres éléments définis. Nos aïeux ne connaissaient pas les plans; ils dessinaient directement sur le bois.

Enfin, ce même jour, j'ai été livré de la petite machine à bois commandée en Allemagne. Elle me sera utile pour faire différentes pièces de bois, du moins dans les limites des dimensions utiles de la machine.


Machine à bois juste déballée.

Ricardo m'a aussi rendu quelques planches de mon bois, à 20mm d'épaisseur, pour les travaux ultérieurs.


Planches de cèdre du Liban.
Voila ! Je suis à pied d'oeuvre. Y'a plus qu'à, comme on dit !

Mais le programme de l'été qui débute est bien chargé d'autres activités. Sur ce projet, rien ne presse, on verra sans doute à la rentrée, à moins que, d'ici les vacances, je ne me fasse la main avec la machine sur le peigne du clavier (le peigne actuel ne me plait pas du tout : il est en isorel et le bout des pointes dépasse !) ou une ébauche de contre-sommier.

A suivre ....

lundi 3 mai 2010

Fin de l'autopsie - Mes conclusions

Après de longues heures d'effort et de patience, la table d'harmonie est enfin décollée; elle est très fine (2 mm) et ne comporte que deux barrages.


La caisse laisse alors voir sa structure.


Elle ne comporte aucun arc-boutant (A tempo giusto en a 2, Le Grimaldi 1697 en a 6). Il n'y a qu'un seul renfort sur le fond et à 45° (A tempo giusto en a 3, le Grimaldi 1697 en a 4, et ils sont dans le sens de la largeur).

Mes conclusions.
Le facteur de cet instrument a voulu faire un instrument très léger, trop léger ! (table de 2 mm, éclisses de 3 mm, par d'arcs-boutants) et il y a toujours un équilibre à trouver entre légèreté et solidité. D'autant que c'était un instrument long (2,5 m) sensé descendre jusqu'au Sol grave (GG) avec un dispositif de transposition, donc rajoutant des cordes, et donc de la tension.

Mais du fait d'un sommier mal fixé sur ses montants, ce dernier s'est décollé et a pivoté  entraînant la fermeture de la fosse et augmenté le serrage des registres déjà problématique sur les italiens.

L'ouverture dans l'échine pour réparer, sortir les registres, et les raboter, a fragilisé celle-ci d'autant que, n'étant pas bien collée aux équerres (équerres en creux), elle a ensuite "flambé", d'où la "bulle" observée au tout début de cette autopsie. Plus rien ne s'opposait alors au "vrillage" de l'instrument.

Dommage ! car au début, il semble qu'il sonnait très bien, ce que je veux bien croire.

Mais il n'a pas tenu !
Il en va des clavecins comme des cathédrales ! (le choeur de Beauvais s'est écroulé en 1245, et a arrêté en son temps la course à la plus grande hauteur !)

FIN DE L'AUTOPSIE.

Un autre histoire est à écrire : la fabrication d''"Opus 5", en évitant bien évidemment de refaire les mêmes erreurs, et faire un instrument qui tienne et qui sonne !

A bientôt.

samedi 1 mai 2010

Décollement de la table d'harmonie.

La dernière opération de "déconstruction" du clavecin consiste à décoller la table d'harmonie. C'est une opération délicate car la table est très mince, et donc fragile. De ce qu'on peut en voir sur les bords, elle fait 1,5 à 2 mm !

Pour la décoller, j'utilise la technique de l'eau chaude et de la vapeur. Une patte-mouille au fer à vapeur fait l'affaire.


L'eau chaude ramollit le bois des contre-éclisses, ainsi que la colle du joint. On n'a plus ensuite qu'à glisser une lame de cutter dans le joint pour la faire passer entre la table et la contre-éclisse.


Il faut du temps et de la patience, mais petit à petit, elle sera entièrement décollée.
Suivant son état final (il y a de petites fentes facilement réparables), je verrai à la réutiliser éventuellement sur "Opus 5".

A suivre ...

mercredi 28 avril 2010

Extraction du sommier.

J'ai décidé d'enlever le sommier de ses montants pour voir comment il était fixé.




Ayant enlevé la joue, j'aperçois un bout de métal juste au bord. Avec quelques coups de ciseaux, je dégage une tête de vis, ou plutôt un boulon; je trouve la même chose côté gauche.


En fait de boulon , c'est plutôt un écrou sur une tige filetée; l'autre écrou est dans le fond, caché par un cache-écrou en bois.

Mais pour bien solidariser le sommier de ses montants, quitte à utiliser ce genre de fixation pas très historique, il eut mieux valu en mettre deux, à chaque extrémité du sommier sur les montants, car deux points forment une droite, alors qu'un seul donne un axe de rotation ... Pas étonnant que le sommier, soumis à un effort de rotation ait pivoté autour de cet axe !



Je remarque aussi que les montants du sommier sont en épicéa, très tendre (on le marque à l'ongle); ce n'est pas le meilleur bois pour ces pièces. En général on met du chêne, beaucoup plus dur et solide.

Le sommier lui-même est en hêtre, constitué de plusieurs planches collées, mais il est fendu dans les basses, suite à un retrait de séchage.



Chaque opération amène son lot de surprises. Je comprends mieux maintenant la raison des pattes de fixation du sommier aux montants, mais il était sans doute déjà trop tard !

A suivre ...

lundi 26 avril 2010

Plan du Grimaldi 1697

Je viens de recevoir le plan du clavecin de Carlo Grimaldi (Messine, 1697) qui est au Musée National de Nüremberg.
Sur le plan de l'architecture, ce clavecin comporte :
- 6 arcs-boutants,
- 11 équerres sur l'éclisse courbe
- 4 équerres sur l'échine
- 4 raidisseurs de fond posés en transversal.

Ceci est à comparer aux :
- 8 équerres sur l'éclisse courbe,
- 4 équerres sur l'échine,
- 1 raidisseur de fond posé en oblique.
du clavecin défunt qui, pour la même longueur et 5 notes de plus (GG#, c'''#, d''' et transposition +/- 1/2 ton), a donc nettement moins de contre-réactions d'efforts.

Une faiblesse de plus sur le plan de la conception !

samedi 17 avril 2010

De surprise en surprise !

Maintenant que les choses sont claires sur le plan de la déformation de l'instrument, je l'ai décordé. Aussitôt, la fosse s'est déserrée, et j'ai pu enlever les registres sans problème.

Je m'attache donc maintenant à "déconstruire" l'instrument, pour en savoir plus sur son architecture interne.

J'ai donc tout d'abord décollé l'échine, ce qui me permet de voir tout l'intérieur de l'instrument, et là, surprise : la forme des équerres !



Alors que dans la littérature (Hubbard notamment), et sur A tempo giusto, les équerres collées sur le fond et soutenant les contre-éclisses, sont réellement des équerres, là, un des côtés de l'angle droit a été usiné en creux sur 12 mm, pour une corde de 80mm ! Et elles sont toutes de cette forme : les 4 de l'échine, et les 8 de l'éclisse courbe.


Même à la queue, le barrage en croix est éloigné de l'échine de 3mm, sauf l'extrémité qui est donc le seul point fixe de l'échine, sur la totalité de sa largeur depuis la queue jusqu'au sommier.

Nul doute que cette conception a pour but de faire résonner les murs de l'instrument puisque les éclisses sont aussi fines qu'une table d'harmonie : 3mm !

Mais, car il y a un mais, ce faisant, la rigidité de l'échine, et on l'a vu précédemment, en a pris un coup, puisqu'elle a "flambé". Tous ceux qui ont fait un peu de Résistance Des Matériaux se rappelleront que l'effort pour faire flamber une poutre d'une section donnée varie comme le rapport inverse du carré de la longueur. (F=K/L2). Plus la poutre est longue, plus l'effort de compression pour la faire flamber est faible. Pour éviter cela, il faut s'assurer de points fixes répartis sur le longueur de la poutre (cas des échafaudages sur les immeubles de grande hauteur par exemple).

Ainsi, avec deux mètres de portée, l'échine a flambé, avec une force de 100 Kgf environ (20% de la tension totale). Si elle avait été bien collée sur toute sa largeur en 5 points, soit 6 intervalles, la force nécessaire pour la faire flamber de la même façon aurait du être 36 fois plus forte, soit 3,6 Tf, ce qui est impossible puisqu'il n'y a que 500 Kgf de tension globale.

Conclusion : le facteur original a voulu sans doute "gagner" en sonorité, mais l'instrument a perdu en résistance structurelle ! Comme on dit souvent, et surtout dans ce cas, le mieux est l'ennemi du bien.

Maintenant, il se peut qu'historiquement, ceci se soit fait; je vais enqêter auprès du forum américain HPSCHD-L pour le savoir. Restera à voir dans ce cas si le ou les instruments en question ont tenu ou non.

Car rien ne dit que tous les instruments qui sont dans les musées aient été les meilleurs; on a pu aussi récupérer des "essais" qui n'ont pas marché, voir des nullités.

A suivre ....

vendredi 16 avril 2010

Cedrus Libani !

Une chance inouïe !

Un clavecin italien, traditionnellement, est construit en cyprès; c'est en partie le cas de A tempo giusto, (en partie car le fond est en tilleul).
Je me suis donc mis en quête de trouver du cyprès. Pas facile ! Introuvable en France, il faut sans doute chercher en Italie; normal !

Dans mes recherches, à tout hasard, j'ai fait "Cèdre du Liban" sur Google, et là bingo ! Au fin fond d'une menuiserie vosgienne, un menuisier à la retraite soldait un stock d'un mètre cube de Cèdre du Liban, qu'il avait fait venir du Liban, il y a plus de 5 ans (il est donc extrêmement sec !) , pour faire des caves à cigares....

En effet, le Cedrus libani est un bois odorant et imputrescible qui fait fuir les insectes; de ce fait, c'est un bois sain. A ne pas confondre avec le Western Red cedar américain.

C'est aussi un bois "saint", mythique, mieux "biblique" car c'est l'arbre le plus cité dans la Bible, compte tenu de la noblesse de son port et de sa grande qualité comme bois de construction. Le Liban n'est-il pas appelé le "pays du Cèdre".

Pensez-donc, dans l'Antiquité, le bois de Cèdre était objet d'échanges commerciaux et de tributs entre les peuples du Moyen-Orient. A l'époque, on payait ses impôts en métal, ou en bois de Cèdre ! La tradition rapporte aussi que le temple de Salomon fut construit en bois de Cèdre du Liban.

J'ai donc acheté deux plateaux de 5m*0,6m et 58mm d'épaisseur, qui coupés en deux me font 4 plateaux de 2,50m qui viennent de m'être livrés, soit environ 180 Kg de bois. Compte tenu des chutes, de l'aubier, des noeuds, je pense néanmoins que je devrais en avoir largement assez pour faire un clavecin.

En plus, le vieux menuisier m'a donné les meilleurs plateaux, ceux qui sont au centre de l'arbre. En comptant les cernes, cet arbre avait 70 ans quand il a été abattu.

Opus 5 sera donc en Cèdre du Liban. Il va falloir songer maintenant à le débiter ....

A suivre!

lundi 29 mars 2010

Les sautereaux se touchent !

Conséquence nette de l'inclinaison du sommier vers l'arrière de l'instrument, le registre avant n'est plus vertical, il s'incline vers l'arrière, et les sautereaux ont tendance à se toucher en haut, surout dans les aigus.
Alors que la distance entre les sautereaux à la base est d'au moins 6mm, quand on actionne la touche, il ne reste par endroit qu'un mm entre les hauts des sautereaux; certains même se coincent !


Déformation du contre-sommier.

Jusqu'ici, je n'avais prêté attention qu'à la déformation de l'échine, en bas du contre-sommier. Maintenant que l'instrument est sous-tension depuis plus d'une semaine, j'ai examiné plus attentivement la déformation du haut du contre-sommier sous la poussée horizontale de la table.


On voit très nettement que le haut du contre-sommier est déformé, et poussé d'environ 2 mm vers l'avant de l'instrument, produisant une amorce de fente, favorisée par une vis de fixation du contre-sommier sur le montant et située à cet endroit.

Mais ce qui me frappe, c'est le vide de 7 mm existant entre le montant du support du sommier et le haut du contre-sommier. La partie haute du contre-sommier ne descend pas jusqu'au montant du châssis, se privant par là d'un point d'appui supplémentaire pour s'opposer à la tension des cordes. Cette partie haute est ainsi "flottante", collée à la partie basse du contre-sommier, mais sans aucun appui sur les montants latéraux.

Vérification faite sur le plan et le montage de "A Tempo giusto", sur ce dernier la partie supérieure du contre-sommier descend bien jusqu'au montant latéral.

Erreur ou montage original de Grimaldi ?

On verra plus tard, car j'ai commandé le plan du Grimaldi 1697 du musée de Nüremberg, plan qui a servi à de nombreux facteurs pour faire des italiens "longs", et sans doute utilisé par le facteur original de cet instrument.

De ce fait, la table s'est avancée dans la fosse de 2mm, contribuant ainsi à "serrer" les registres.
Pivotement du sommier et avancée de la table contribuent à fermer la fosse par le haut !


Dernières remarques : l'équerre de rappel du contre-sommier sur le fond semble légèrement décollée dans le haut, ce qui semble logique vu la déformation.

Enfin, je n'observe pas de "raidisseur" du contre-sommier (côté table) comme sur "A Tempo giusto".

lundi 22 mars 2010

La déformation de la caisse

En ayant mis l'instrument sous tension sur mon établi depuis 48h, j'observe que le bombement longitudinal du fond s'est amplifié par rapport à la situation "hors tension". On voit très nettement l'avant se relever d'environ 12 mm. Le point d'inflexion se situe au niveau du contre-sommier.


De la même façon, l'instrument est cintré en creux sur la largeur. En mettant une régle horizontale sur le bord du clavier, je mesure 6mm de flèche ....


Ces deux constatations m'amènent à penser que le fond est très déformé sous la tension, tant sur la longueur que sur la largeur. L'instrument ne tient pas l'accord, et j'ai l'impression que plus on attend, plus l'instrument se tord longitudinalement et transversalement.

J'ai alors eu l'idée de mesurer l'écart de l'échine avec le contre-sommier, à l'endroit du "trépannage". Bien m'en a pris !
En trois jours, et avec une tension qui est loin d'être nominale (en gros, La3 à 375 Hz), l'échine s'est éloignée à 3,5 mm au lieu de 2 mm quand l'instrument était "hors tension".




Ceci prouve que sous l'effet du bombement de l'instrument de l'avant vers l'arrière, un effort important longitudinal a porté sur l'échine, qui est mince (3,5mm) provoquant son flambement et son décollement du contre-sommier. Voila l'origine de la "bulle" de l'échine.

De plus, maintenant, les registres sont bien serrés ... et côté échine, la fosse s'est réduite à 37 mm.

Je remarque aussi que le cintrage en largeur a fait décoller la moulure de finition du sommier sur le bord de la fosse.

Il est clair que la tension des cordes a fait se déformer cet instrument, tant dans le sens de la longueur, provoquant la "bulle" observée sur l'échine, que dans le sens de la largeur.

Cela revient à dire que le fond n'a pas résisté à la tension, ce qui est capital dans un italien. Il est possible qu'un bois insuffisamment sec ait pu provoquer un retrait longitudinal et transversal, amplifié alors par la tension des cordes. L'absence de raidisseur sur le fond, à l'avant, a permis son cintrage transversal d'autant qu'une table d'harmonie dont les fibres sont à 27° de l'échine transmet un effort transversal plus important qu'une table à fibres parallèles qui alors travaille "en compression".



Conclusions : contrairement à ce que l'on peut penser, les éclisses participent à la structure de l'instrument. En particulier, l'échine agit comme raidisseur du fond. Si cette éclisse est trop mince, elle "flambe", et l'instrument se déforme d'une manière irrécupérable.

Pour l'avenir, je me propose donc, si je refais un tel instrument de grande longueur descendant à GG, de :
1) de mettre un raidisseur transversal, à l'avant, sur le fond
2) de mettre des éclisses plus épaisses (5 mm comme sur "A tempo giusto", voire 6mm sur l'échine)

A suivre ...

samedi 20 mars 2010

La seconde réparation

J'ai examiné plus en détail la fixation du sommier sur ses montants. Il est clair que c'est une réparation d'un sommier qui s'était décollé ou déformé; il est impensable que ce soit le montage initial.
Mais c'est une réparation très aléatoire, car le sommier ne repose pas sur ses montants, sauf au niveau de la cale et sur le devant. Cette "cale" n'est même pas taillée à la largeur du montant, et elle déborde.
A quoi sert cette cale de 2 mm ? Pour pencher un peu le sommier vers l'avant ? Un problème de cote des cordes au niveau des registres ? Un cintrage du sommier ? A voir ...


Quoi qu'il en soit, après avoir mis l'instrument sous tension (au "pitch" à 392 Hz pour l'instant), l'observation de la fixation côté droit montre une légère fente de la cale de bois.


J'ai relevé le plan de cordage (diamètre des cordes et 4 longueurs par octave sur les cordes longues), et calculé la tension globale de l'instrument. On tourne aux environs de 510 Kgf à 415 Hz, et 570 Kgf à 440 Hz. Les 6 cordes basses (de BB à GG#) absorbent 24% de la tension globale; ces cordes sont montées en laiton rouge de 0,025 pouces, soit 0,63 mm.
Dans les aigus, les cordes sont en acier de 0,008 pouce (0,2mm).
La tension maximale dépasse les 12Kgf pour AA, alors qu'elle est de l'ordre de 2 Kgf dans les aigus.


Enfin, sur cette photo de détail, on voit que l'échine est constituée, dans sa partie haute, de 4 pièces : deux moulures, l'éclisse de 3,5 mm et une autre pièce de bois vers l'intérieur qui s'arrête au niveau de la table d'harmonie. Mais cette partie haute, collée à l'éclisse mais pas sur la table, a tendance à fléchir l'éclisse au niveau de la table. Ceci est la cause de l'évasement du haut du clavecin, et forçe à verrouiller le chapiteau avec des clavettes.

A suivre ...